Scène de vie :

Un de mes enfants est en première et suit un cours d’éducation morale et civique. Dans ce cadre, son professeur organise des débats autour de l’engagement citoyen. Une des consignes pour préparer ces débats est d’anticiper les arguments de la partie adverse pour pouvoir les contrer. J’ai été surpris par cette démarche car il me semble que cela conduit davantage à une joute oratoire qu’à un débat avec un échange.

Il est vrai qu’en France nous avons la culture du verbe pour convaincre l’autre, en faisant s’opposer deux plaidoiries bien ficelées. Nous nous plaçons alors dans une situation d’opposition, voire de combat, dans lequel il y a un gagnant et un perdant.

La place de l’écoute :

Dans les entreprises cette culture colore les relations entre les individus et impacte la place que nous accordons à l’écoute. Nous n’écoutons pas l’autre pour comprendre ses arguments, le comprendre et chercher un terrain d’entente, mais nous l’écoutons pour pouvoir mieux argumenter, le contrer et remporter la victoire, c’est-à-dire avoir raison. Nous aurons alors gagné la bataille du débat mais perdu la guerre de l’échange.

Le peu de place que nous laissons à l’écoute et à la compréhension de l’autre nuit à la qualité de nos relations professionnelles.

Nous refusons parfois d’écouter car nous pensons que notre écoute vaut approbation. Nous oublions que nous pouvons écouter l’autre, comprendre son point de vue sans pour autant être d’accord, et exprimer notre désaccord après l’avoir écouté.

Se centrer sur l’autre :

Ecouter l’autre demande un vrai lâcher prise, c’est-à-dire se centrer sur l’autre et non plus sur soi, de manière à recueillir tous les signes de communication qu’il nous adresse, verbaux comme non verbaux, pour saisir le mieux possible le message qu’il nous transmet.

Cela suppose que le manager arrête de penser à la question suivante face au candidat rencontré en entretien de recrutement, ou à l’argument qui va lui permettre de contrer son collaborateur lorsque les avis divergent.

Ecouter l’autre pour le comprendre, c’est aussi l’encourager à s’exprimer, en levant le nez de son ordinateur et en lui laissant de la place.

J’ai bien conscience qu’il est difficile pour les managers de prendre le temps de l’écoute compte tenu du rythme auquel ils sont soumis. Les équipes sont parfois nombreuses et il est bien entendu impossible de prendre ce temps avec chacun, au gré des besoins.

Etre en « pleine présence »:

Au-delà du temps consacré à chacun, il me semble que l’écoute est d’abord une attitude, une disponibilité d’esprit qui permet au manager d’être attentif à ses collaborateurs : la manière dont il dit bonjour, son regard, sa capacité à se rendre disponible et surtout sa pleine présence lorsqu’il est face à l’un de ses collaborateurs. C’est parce que le temps d’écoute est bref, qu’il doit être de qualité.

Si le manager n’en est pas capable au moment où son collaborateur le sollicite, il peut légitimement le lui dire et convenir d’un moment où il sera plus disponible.

L’augmentation de la complexité des missions et des fonctions associée au sentiment généralisé d’accélération du temps font que la capacité à être pleinement présent au moment de l’écoute est une compétence clé que les managers doivent cultiver pour l’efficacité et le bien-être de leur équipe.

Excellente semaine à chacun